- Ou comment que je suis trop pressée d'arriver !
["Mini" flash-back]
Toc.
- Hmm.
Toc Toc.
- HHMMMM.
Toc toc toc.
- "HMM', j'ai dit !
- Ah ? Pardon.
Je soupire. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire, avec une suivante aussi nulle ? Même pas fichue d'ouïr un 'Hmm" si délicat. Quoi ? Je suis de méchante humeur, c'est ça ? Et alors ! Qui ne le serait pas...
Voilà bientôt quinze jours que Mère et pis Père et pis tout le monde, il m'a enfermé dans ma chambre. Ô pauvre de moi ! Dehors il fait trop beau, et si ça se trouve y a plein de trucs qui se passent, et pis moi et bah je suis même pas au courant ! C'est nuuuuuuuul !
Une tartine ?
- Mouais.
Je bougonne, puis me jette sur le précieux met. On crève la dalle, ici. Toute façon, y a que ça que je peux faire. Manger. Alors je me goinfre, à mort, et... Une pensée me vient. Si je mange comme ça, je vais devenir grosse. Enoooorme ! Comme Feue Valuu ! Et j'aurai jamais de prince charmant !
Horrifiée, je recrache tout à la figure d'Anelha. Sans lui laisser le temps de réagir, j'enchaine et saute du lit.
Mademoiselle ! Vous ne devez p...
- Mais si ! C'est bon pour la forme ! Il faut que je sois grande et fine, comme Princesse Blanche.
Me voilà donc partie dans une série d'étirements. Une, deux. Trois, cinq. Douze, quatre. Euh...
Du nouveau, Anelha ?
- Rien de grave. La mini-Nagirrok est née, c'est l'anniversaire de Margot, qui est partie avec Blanche en France, Kante est notre nouveau maire, et votre Père s'est rasé.
- QUOI ?
- Oh, ce n'est pas si terrible, vous savez.
- Mais c'est affreux !
- Nenni, on lui trouve un nouveau charme et...
Je la foudroie du regard.
Tu regardes mon papa ?
- Euh...
- J'vais le dire à Mère ! NA !
A son tour de soupirer.
Cet intermède Mumiesque ne m'a cependant pas fait oublier la plus terrible nouvelle. Car si le monstre Blaino-Briochin allait me faire concurrence, c'est certain, ce n'était rien comparée à l'horriiiible peur qui m'envahissait.
C'est où qu'elles sont parties ?
- Qui ça ?
- Princesse Blanche et Margot, débile !
- En France.
- Mais oooooooù ? Et faire quoi ?
C'est dur d'être entourée de gens qui sont si lents. Presque autant que de tenir Lemerco éloigné d'une bouteille. C'est dire !
- Au Vicomté de Cauvisson, Mademoiselle.
- Connais pas.
- Un bled français, certainement.
- Mais pourquoi qu'elle quitterait notre chère et noble Bretagne pour cette terre toute pourrie ?
- Je ne sais pas. Peut-être parce qu'elle y a été invitée en tant que jeune noble des Royaumes. Tiens d'ailleurs, vous avez reçu du courr...
Et là, c'est le drame. Fatigue, maladie ? Oubliées ! J'étais presque remise, mais désormais, voilà que je suis GRANDE, voilà que je suis FORTE, voilà que je suis DESESPEREE !!!
Donne moi ce courrier, vilaine !
Je bondis, je lis -ou déchiffre, plus exactement. J'ai pas tout compris, mais l'essentiel est là.
Elles sont parties... Sans moi ?! Elles n'ont pas songé à m'emmener ?
- Oui. Enfin non !
- Comment ça ?
- Maintenant que vous le dites, Margot est passé avant-hier. Mais je lui ai dit que vous étiez souffrante.
- Tu n'as as osé !
- Mademoiselle, il fallait bien.
- Mamaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaan !
[Une demie-heure plus tard]
Tu as tout ?
- Oui !
- Sûre ?
- Oui oui !
- Il me semble pourtant que... Mais où est Anelha ?
- Malade ! Indisposée !
- Medb, chérie, j'aimerai que ta suivante t'accompagne.
- Mais euh ! Il y en aura plein des suivantes, là-bas ; et pis y aura Blanche, Margot, et pis p'têt Eo ! J'aurai pas besoin d'elle ! Et Beilhal me protège le temps du voyage !
- Fort bien. Allons embrasse-moi.
Smack.
Et pas de bêtises, hein.
- Tu me connais !
- Oui, justement.
Tagada, tagada. C'est partiiiiii !
Et me voilà qui part dans mes rêves de princes et de princesses... J'ai tout tout ce qu'il faut pour ça. Pour devenir Princesse. L'éducation de Blanche, qui sera là d'ailleurs, pour me conseiller en direct-laïve ; et pis, bien sûr, tous les accessoires.
Je souris. C'est bien, d'avoir un papa Duc.
[L'arrivée]
Comment je suis ? Fatiguée, énervée. Moche, surtout. Ma robe est toute plissée, à force de me tourner et de me retourner... J'espère que j'aurai un peu de temps pour me changer avant de me présenter ! C'est la première impression qui compte.
Beilhal ! C'est quand qu'on arrive ?
- Très bientôt, Mademoiselle ! Au bout de cette route !
- HAN ! C'est là ! C'est juste là ! C'est à côté ! Blanche et tous les princes de France sont là ! Tu rends compte ?
- Euh... Oui !
- STOOOP !
Badaboum, criiiiiiiiitch.
Arrêt sans douceur. Je me prends de plein fouet la paroi du carosse en face de moi. Une bosse, des pleurs.
Tout va bien ?
- Je suis moooooooche !
- Mais non, allons ! Tenez, vous pouvez vous changer derrière ce bosquet et puis je vais vous coiffer :
- Beilhal. Tu es un monsieur, tu sais pas coiffer.
- A force de regadrer Anelha ou Madame votre Mère faire, vous savez...
- Oh. Tu crois ?
- Certainement, Mademoiselle.
Je souris, aux anges.
C'est ainsi qu'un petit quart d'heure plus tard, le carosse reprenait sa route pour se présenter au portail.
Moi ? J'ai une jolie robe violette, donc le dorsal lacet risque de céder d'un instant à l'autre. Une bosse orne mon front, j'ai quelques résidus de boue sous les ongles, et ma coiffure est proche de celle de Papy Proto par temps de tempête.
Mais bon, je le vois pas. Alors, au moins, j'ai le sourire !